Les NPI et l'industrialisation du tiers monde, Cursus,
Armand Colin, 1993, 189 p.
Quatrième de couverture : Le développement des nouveaux pays industriels (NPI) et la progression de leurs exportations dans le commerce mondial se présentent à la fois comme un espoir pour les pays pauvres, qui voient la possibilité de sortir du sous-développement en appliquant leur modèle, mais aussi comme une menace pour les pays développés qui n'échappent pas depuis vingt ans au marasme économique.
Ce livre se propose d'examiner le phénomène d'industrialisation dans les pays du tiers monde en traitant plus particulièrement des NPI. Il ne s'agit pas d'un série de monographies sur différents pays, mais d'une étude exhaustive du concept d'industrialisation, de sa problématique et de ses liens avec le développement économique, appuyée sur des exemples significatifs. Pour ce faire, une première partie consacrée aux faits présente les différentes phases de l'industrialisation dans le monde depuis la révolution industrielle jusqu'aux évolutions actuelles, ainsi qu'une analyse du phénomène NPI et de la place du tiers monde dans l'industrie et le commerce mondial de produits manufacturés. Puis sont passées en revue les théories de l'industrialisation : les visions classiques et néoclassiques, et les théories qui proposent une alternative à l'optique traditionnelle, qu'elles soient dépendantistes, néomarxistes, radicales, structuralistes ou institutionnalistes. La troisième partie s'attache aux stratégies, aux politiques d'industrialisation suivies dans le tiers monde et aux résultats obtenus. Ainsi apparaissent le poids respectif de l'État et du marché dans le dosage des politiques économiques, et les différentes options vis-à-vis du commerce extérieur. Enfin des cas, illustrant les performances comparées de l'Asie orientale et de l'Amérique latine, et la situation caractéristique de l'industrie automobile, mettent en lumière les facteurs culturels et institutionnels du développement rapide de certains pays, et les stratégies qui ont permis d'obtenir les meilleurs résultats tant économiques que sociaux.
La Gestion en résumés, n° 21-22, 1993
Cet ouvrage aborde les questions complexes de l'industrialisation des pays en voie de développement, en s'intéressant au cas particulier de ceux que l'on a appelé les "Nouveaux pays industrialisés" d'Asie. L'auteur rappelle d'abord les grands traits de l'industrialisation dans le monde. L'industrialisation britannique s'est faite sur le modèle des entreprises familiales, des matières premières locales et d'un État libéral. En France, en Prusse, au Japon et en Russie les banques et sociétés anonymes ont joué un rôle clef, et l'État est intervenu activement. Quant aux PVD, ils ne s'industrialiseront pas en un siècle : leur expansion industrielle commence dans un contexte très différent, tant sur le plan économique (ils entrent d'emblée dans le commerce international), que sur les plans démographique, technologique et institutionnel. Parmi eux, avant 1950, l'Amérique latine connaissait la plus forte croissance. Entre 1950 et 1973, la croissance latino-américaine s'est ralentie, au profit de l'Asie et même de l'Afrique. Depuis 1973, l'Amérique latine et l'Afrique s'enfoncent dans la crise, et la croissance des pays asiatiques s'accélère. on peut définir ces "NPI" par un niveau de vie supérieur au seuil des "pays à revenu intermédiaire", un taux de croissance industrielle supérieur à 4 % par an entre 1965 et 1990, une part de l'industrie dans le PIB supérieure à 25 % en 1990, et une certaine diversification des exportations.
La deuxième partie expose les différentes théories de l'industrialisation. A la théorie libérale qui règne au GATT, au FMI et à la Banque mondiale, s'opposent plusieurs théories alternatives. Les théories structuralistes accordent un rôle primordial à l'industrialisation dans le développement économique, et ne considèrent pas l'industrialisation comme un phénomène naturel : l'État doit mener une politique industrielle forte, dans une perspective de transformations structurelles. Pour les théories radicales, d'inspiration marxiste ou néomarxiste, les obstacles au développement des PVD résident à la fois dans l'organisation des rapports de force internationaux et dans les structures économiques et sociales internes. Pour les théories institutionnalistes, qui connaissent un certain renouveau, les problèmes économiques relèvent avant tout de l'organisation du système économique, de la structure du pouvoir qui le contrôle, et du système de croyances et de valeurs qui le caractérise ; le progrès économique dépend non seulement de la technologie mais aussi des institutions créées par les hommes.
La troisième partie fait le bilan des politiques d'industrialisation appliquées dans le PVD, et des résultats obtenus. L'expérience des NPI d'Asie fournit des arguments à la fois aux "interventionnistes" et aux "libéraux". L'on peut retenir que leur succès est basé sur l'importance des politiques industrielles et sur les mesures de protection du marché intérieur. Mais l'on peut aussi retenir l'ouverture extérieure, la multiplication des entreprises privées, et la neutralité vis-à-vis des prix... Si l'on veut dépasser cette controverse, la leçon à tirer de l'expérience des NPI d'Asie est plutôt celle-ci : les PVD ne peuvent se passer de l'action de l'État, mais celle-ci doit être mieux orientée que par le passé. Les Etats doivent atténuer leur rôle de producteurs industriels, de distributeurs et monopoles dans le secteur rural, au profit d'actions sur les infrastructures, la santé, l'éducation, la sécurité, et l'appui aux secteurs porteurs. Selon la formule du "néo-interventionnisme" à l'oeuvre à Taiwan ou en Corée du Sud, l'État doit "guider" et non "remplacer" les marchés.
La dernière partie expose différents cas, afin de souligner les éléments stratégiques et culturels du développement rapide de certains pays. On peut analyser le succès des NPI asiatiques par des facteurs exogènes, mais aussi par certains facteurs internes. Parmi ces derniers, certains sont liés aux politiques économiques et pourraient donc servir à construire des modèles de développement : des politiques prudentes vis-à-vis du risque inflationniste et du risque de volatilité des taux de change, et des mesures de diversification de la production industrielle. Mais parmi ces les facteurs internes, on trouve aussi des éléments sociaux, culturels, et institutionnels : le blocage « latino-américain » n’est pas indépendant du poids oligarchique des propriétaires terriens et des États tombés sous la coupe d’intérêts particuliers…
Anne Paillet
РЎССЌАЯ МБЇСЛБ La Pensée russe, 6 novembre 1993
Le développement des Nouveaux Pays industrialisés (NPI), surtout à partir des années 70, représente, pour les pays qui ne sont toujours pas parvenus à sortir du sous-développement, comme un espoir. Même les pays d'Europe orientale et centrale peuvent s'inspirer de cette expérience de développement qui s'appuie essentiellement sur une spécialisation productive permettant une bonne insertion dans la division internationale du travail et qui a été conduite dans un certain nombre de pays d'Amérique latine et surtout d'Asie orientale. Outre l'intéressante présentation de l'histoire et des théories de l'industrialisation, la partie concernant les stratégies d'industrialisation mérite une attention particulière. La place qu'il convient de laisser, respectivement au marché et à l'État, est une question toujours d'actualité, de même que celle du choix du degré d'ouverture de l'économie. L'auteur a la sagesse de ne proposer aucune recette, mais d'expliquer à partir d'exemples concrets pourquoi telle option, ici a permis l'industrialisation et la sortie du sous-développement, pourquoi la même option, appliquée dans un concept moins favorable, ou une autre option, n'a pas eu les mêmes retombées positives. La référence à l'environnement culturel et institutionnel comme facteur de développement plus ou moins rapide paraît à cet égard tout à fait fondée. Reste que les progrès économiques fulgurants de plusieurs NPI n'ont pas été accompagnés d'un progrès social de même ampleur, ce qui jette une ombre sur ce modèle.
Pierre Henck
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