Histoire
des faits économiques et sociaux, t. 2, De la révolution industrielle à la
Première Guerre mondiale, A. Colin, 1998, rééd. 2004
Quatrième de
couverture :
Cet ouvrage fait suite à l'Histoire des faits
économiques, tome 1 : De l'Antiquité à la révolution industrielle.
Alors que le premier tome insistait sur les caractéristiques de la
discipline « histoire économique », sur les racines et les
mécanismes de la révolution industrielle au XVIIIe, siècle, ce
deuxième volet, en s'appuyant sur de nombreux textes et documents,
analyse le déroulement de l'industrialisation au XIXè siècle, ses
aspects techniques, économiques, politiques et son impact sur les
sociétés en Europe et dans le monde.
• Il s'ouvre sur le cas de la Grande-Bretagne, de sa suprématie mondiale à son déclin relatif, puis il présente l'extension de l'industrialisation vers le continent. Il décrit les mutations du capitalisme industriel par l'étude des cycles, des fluctuations et des crises, et par l'observation des aspects techniques de la deuxième révolution industrielle et des transformations qui affectent les entreprises.
• Les aspects sociaux sont illustrés par l'évolution des catégories sociales avec la montée de la bourgeoisie, des classes moyennes et de la classe ouvrière, l'apparition des idées socialistes, les conflits politiques et sociaux, etc.
• La mondialisation s'affirme déjà dans les mouvements des hommes, des marchandises et des capitaux, et annonce la situation actuelle.
• L'impérialisme, phénomène international majeur de la fin du XIXè siècle est examiné dans ses causes, ses caractéristiques et ses conséquences, qui marqueront durablement tout notre siècle.
• Il étudie enfin l'extension de l'industrialisation hors de l'Europe occidentale : États-Unis, Japon, Russie tsariste et pays périphériques en Amérique latine ou au Moyen-Orient.
(édition 2004)
Alternatives économiques, n° 174, octobre 1999
Le second tome de cet ouvrage tiens les promesses du premier, même si, couvrant le XIXe siècle (jusqu'à la guerre de 1914-1918), il consacre très peu de place aux problèmes méthodologiques qui faisaient l'intérêt du tome précédent : il ne s'agit plus de s'interroger sur les raisons de la révolution industrielle, mais de la décrire à l'oeuvre.
D'une écriture limpide, avec ce qu'il faut d'anecdotes et de détails pour donner de la chair à une histoire dont chacun connaît au moins les grandes lignes, le volume – un manuel, pourtant ! – se lit avec plaisir.
Sur le fond, l'auteur ne se borne pas à décrire les changements économiques ou technologiques de la révolution industrielle. Il en détaille aussi les conséquences sociales souvent dramatiques ("produire la richesse en créant la misère", Victor Hugo), suscitant interventions publiques et réglementations : le libéralisme économique n'aura duré qu'un siècle.
Le chapitre sur l'impérialisme, assez inhabituel dans ce genre d'ouvrage, est instructif. L'inhumanité supposée des colonisés justifiait alors l'inhumanité réelle des colonisateurs. La condamnation à cinq ans de prison (avec demande de réduction de peine) d'un Français pour avoir fait exploser, le 14 juillet, un bâton de dynamite attaché au cou d'un Africain suscitait alors un commentaire indigné de la part de la communauté coloniale : "C'est à se faire naturaliser nègre !" Civilisation, que de crimes on connaît en ton nom...
M.-Cl. J.
Livret ouvrier, 1876
L'Europe en formation, n° 317, Été 2000
Il est rare de pouvoir recommander sans aucune réticence aux lecteurs de L'Europe en formation un ouvrage écrit à l'intention des étudiants et publié dans une collection qui revendique son caractère universitaire. C'est sans doute parce qu'il n'est pas un historien de formation mais un économiste passionné par l'histoire que J. Brasseul réussit à rendre aussi accessible non seulement les faits saillants du développement économique de l'humanité, mais encore les débats qui divisent les historiens aussi bien à propos de la lecture des faits eux-mêmes que de leur interprétation. Il fallait du souffle pour mener à bien ce travail qui nous conduit de l'invention de l'agriculture, par les femmes, aux alentours du VIIIe millénaire avant notre ère, jusqu'à l'âge d'or (gilded age) du capitalisme - qui fut aussi celui des barons pillards - robber barons - avant la première guerre mondiale. Évidemment, les époques successives ne font pas l'objet d'un traitement identique : pour des raisons aisément compréhensibles (essentiellement la disponibilité des sources documentaires), l'histoire qui nous est contée prend de l'épaisseur au fur et à mesure que les faits dont elle rend compte se rapprochent de nous. Dans le premier volume, la première révolution industrielle, celle du XVIIIe siècle, mobilise à peu près autant d'espace que toutes les étapes précédentes de l'évolution de l'humanité depuis les origines. Quant au second volume, il est consacré entièrement aux cent années qui vont de 1815 à 1914. Un troisième volume est annoncé qui couvrira le court XXe siècle (à partir de 1914).
Il n'est pas possible de résumer le contenu de ces deux volumes très denses qui font le point, de manière détaillée, sur une foule de questions. Chacun trouvera matière à réfléchir sur ce qui l'intéresse particulièrement, mais il faut souligner ici d'une part l'érudition de J.B. et d'autre part son souci de nous présenter les diverses thèses en présence, quitte à nous laisser souvent dans l'incertitude car l'histoire est par nature incertaine. La combinaison d'approches différentes n'est pas pour rien dans la réussite de cet ouvrage : à côté de de l'histoire des faits et de la théorie économique, l'histoire des mentalités, l'histoire sociale et politique sont mobilisées pour brosser un tableau le plus complet possible dans toute sa complexité. Au hasard des pages, on tombe sur des questions souvent inattendues, comme les conséquences économiques des croisades, l'impact de la traite des Noirs aussi bien sur les contrées pourvoyeuses d'esclaves que sur les colonies et sur les nations colonisatrices, les effets redistributifs de la "grande inflation" (celle du XVIe siècle), l'éducation des femmes, la "folie d'Afrique" (qui saisit les colons lorsqu'ils mesurent l'étendue de leurs pouvoirs sur des populations le plus souvent sans défense), etc. On apprend aussi quelques détails insolites comme la date de l'invention du fil de fer barbelé (1868) ou de la chaîne de bicyclette (l'année suivante)...
La croissance économique ne s'est pas accomplie sans heurt tant sur le plan social que sur le plan idéologique. Sur ce second plan, les économistes, en règle générale, se sont faits les défenseurs de la thèse libérale et ils ont plaidé en particulier pour l'instauration du libre-échange entre les nations. Une thèse qui n'est pas sans avoir influencé l'idée que les Européens - les plus éclairés en tout cas - se faisaient de leur continent, bien avant le Marché commun. J.B. rappelle par exemple que, pour Voltaire, "l'Europe [était] une sorte de grande république divisée en plusieurs États". Cela étant, J.B. apparaît un peu tranché lorsqu'il lie - de manière quasi systématique - pratiques protectionnistes et difficultés économiques. Les écrits d'autres historiens de l'économie - ceux de Paul Bairoch en particulier - incitent en effet à défendre une interprétation plus nuancée.
Michel Herland
Compte rendu Denis-Clair Lambert, Région et Développement, n° 11, 2000, p. 203-208
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